Ivan
"Euthanasier ? Non, ne faites pas ça ! Nous venons le chercher."
Sur place, tout le long du chemin au milieu des animaux abandonnés à la SPA, l'appréhension monte : ce n'est pas un endroit pour un furet, ça ! Partout des cris, des aboiements, des hurlements, des miaulements déchirants. L'enfer des animaux doit ressembler à cela - s'il existe une vie pour eux après la mort. Enfin, l'on approche des cages de molosses aux mâchoires impressionnantes, au babines dégoulinantes de bave.
"C'est là."
Et là, en effet, entre ces chiens féroces, prostré dans sa petite cage, le regard morose, se trouvait un furet putoisé amaigri par une existence ingrate.
C'est ainsi qu'Ivan fut recueilli par l'association, qui lui prodigua tous les soins nécessaires. A force de patience et de bons traitements, il reprit du poil de la bête. Sa carrure en imposait : plutôt grand, le visage carré, et toujours cet air morose et sérieux de baroudeur qui en a vu de toutes les couleurs.
Il lui fallut bientôt une famille d'accueil, en attendant qu'il soit adopté - mais il risquait d'y demeurer un certain temps, étant donné que l'été n'était pas la saison la plus riche en adoptions. Beaucoup dans l'association partaient en vacances où étaient déjà partis sous des horizons exotiques, si bien qu'aucune famille d'accueil ne pouvaient s'en charger pour lors.
Mon chéri et moi étions en Bretagne alors, non loin du refuge où les furets attendaient leur famille d'accueil ou leur remise sur pied.
Emus par le cas d'Ivan, nous devînmes famille d'accueil.
Son arrivée parmi nos petites bêtes fut assez marquante : Plume ne s'en soucia guère, mais quand il fallut établir le contact avec les autres furets, par l'intermédiaire de Kynsi, le plus diplomate des trois, le contact fut fulgurant. Une minute n'était pas passée qu'ils jouaient comme de vieux amis. Avec les autres, en revanche, il y eut moult bagarres, cris et grincements de dents. Et les cris des furets qui se battent sont perçants ! Imaginez-vous en train de dormir paisiblement quand tout à coup, des hurlements haut perchés vous tirent brutalement du sommeil... Sans compter l'odeur qu'ils dégagent en ces moments-là !
Avec nous, le contact ne fut pas aisé non plus : Ivan n'avait jamais été dressé à ne pas mordre, et lorsqu'il attrapait un doigt, il ne le lâchait plus. Heureusement, à force de patience, mon chéri réussit à lui apprendre.
Aujourd'hui, Ivan, surnommé Popov à cause "de sa carrure de camionneur polonais", est toujours avec nous. Personne ne s'est intéressé à lui, et nous nous y sommes attachés, si bien que nous l'avons finalement adopté. Il ne mord plus, il ne se dispute plus avec les autres, il joue toujours autant avec Kynsi, mais aussi avec Farah, la petite siamoise.
Bref, il coule des jours paisibles bien mérités après ce qu'il a dû endurer par le passé.